L'Astrada à Marciac | atelier d'architecture King Kong

A new concert hall for the annual international jazz festival Marciac / France / 2011

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Salle de spectacles l’Astrada à Marciac (fra) FRA - Inaugurée au printemps 2011, la salle de spectacle l’Astrada, réalisée par l’atelier d’architecture King Kong à Marciac, est un édifice remarquable. Dédiée au célèbre festival de jazz qui n’avait, jusque-là, aucun lieu en dur spécifiquement dévolu aux manifestations d’envergure internationale qui s’y déroulent, elle a été unanimement saluée. Les artistes, mais aussi l’ensemble du public nombreux – amateurs venus de toute la France et de l’étranger –, qui se presse en été à Marciac, et en premier lieu ses habitants, ont pu bénéficier de son confort, de son agencement spatial parfaitement ajusté à la teneur des événements qui s’y déroulent. L’Astrada fait d’autre part également l’unanimité parmi les historiens et critiques d’architecture. Son volume élégant, dénué d’ostentation, permet à l’édifice de s’insérer en souplesse et en douceur au sein d’un bourg marqué par son passé médiéval de bastide, ainsi que par la présence d’un patrimoine religieux intéressant – témoignage de la présence dans le Gers du gothique méridional, que caractérise notamment un certain souci de rigueur formelle et d’économie de moyens. Empruntant les bases de son propre langage aux divers éléments en place, transposés et étirés vers une architecture contemporaine, respectueuse du passé, mais refusant le pastiche, l’Astrada retient notamment, des rythmes fondant l’âme de la bastide, ses lignes et cadences spécifiques. À l’authenticité qui sourd des maisons basses, aux murs dénués d’apprêt vain, elle répond par l’adoption du béton matricé ou désactivé laissé brut, pour toutes ses surfaces principales, bien que les parois s’animent, en lien avec des besoins fonctionnels, de baies interprétant les arcs en accolade du gothique, tandis que l’agencement des rondins de bois rustiques évoque la présence, encore très perceptible, de lambrequins sur nombre d’habitations anciennes de la bastide. L’enveloppe de l’édifice, à la fois lisse et rude, exprime comme aucun artifice n’aurait pu le faire ce qui constitue la substance, fruit de l’accumulation raisonnée des siècles, de la ville de Marciac. Sans fard, et sans mensonge, elle renvoie aux passés qui composent l’identité plurielle, et pourtant homogène, de la cité gersoise. Sans passéisme, ni nostalgie déplacée, et tout en refusant de figer Marciac dans le rôle d’un lieu de pèlerinage touristique, elle dote la ville d’un équipement à la mesure du rayonnement de son exceptionnel festival, et se fait en cela l’écho de son dynamisme. Par la pureté des matériaux qu’elle met en oeuvre, l’Astrada s’inscrit dans la filiation du patrimoine qui l’entoure, tout en lui inventant un demain. Les contrastes doux et forts à la fois que produit, sous des ciels changeants, l’enveloppe de béton, conjugué aux teintes naturelles du bois, établit entre hier et demain un dialogue nourri de sens en termes de perceptions sans cesse renouvelées. Grâce à cette superbe réalisation de l’agence King Kong, le passé et le futur se tiennent aujourd’hui fraternellement la main, chacun dans son identité spécifique, mais aussi dans une attitude de respect mutuel nourri de connivences, riches et subtiles. La salle de spectacle de Marciac est très certainement l’une des plus belles réussites qui ait dernièrement vu le jour, dans ce type de programme, en France notamment. Delphine Costedoat, historienne de l’art, critique d’architecture Note sur le projet urbain, architectural et scénographique Le projet d’implantation d’une salle de concert dans la Bastide de Marciac s’inscrit dans un large cadre de développement d’un pôle culturel territorial sur la commune. L’implantation de ce pôle est l’occasion de l’aménagement urbain d’un grand îlot situé au nord est de la Bastide. A l’analyse du contexte et de la lecture du programme, il nous a paru important, tout à la fois de redynamiser ce quartier excentré et de l’intégrer dans un schéma urbain signifiant un « déjà-là ». Nous avons proposé une greffe urbaine qui, à l’échelle de la ville, ne bouscule pas une pratique organisée et ordonnée du tissu urbain mais offre, comme ailleurs parfois, la surprise d’une découverte. Une route légèrement dévoyée, une nouvelle cour à découvrir et, surtout, un équipement public d’importance qui se dérobe au lointain car dissimulée dans un tissu urbain dense qui, de près, offre aux visiteurs, aux festivaliers et aux résidents la vision d’une architecture contemporaine intégrée dans son écrin patrimonial. Le projet est avant tout de créer un vide, une cour de plus. Structurer ce vide par le plein, en organisant avec l’existant, à terme, une succession de places. Nous avons souhaité favoriser une pratique piétonne du lieu et poursuivre l’axe structurant de la rue des Lilas pour les véhicules. La pratique piétonne du lieu permet, sans passer par l’intérieur du bâtiment de l’école primaire, de cheminer depuis la place du chevalier d’Antras vers la place de l’école primaire, puis vers la placette et le parvis de l’établissement. La placette est plantée de platanes qui portent ombrage et quelques bancs invitent au repos. L’existant est préservé au maximum pour dessiner la place. Ainsi, on conserve un espace engazonné, un muret, une histoire et des pratiques. Le jeu de boules réapparaît, l’aire en stabilisé permet différents usages. La salle de spectacles : La conception de la salle s’articule autour de la recherche d’une forme, d’un espace et d’un volume en accord avec ses différentes destinations. C’est un des objectifs principaux de l’architecture des salles, où il faut conjuguer les fonctionnalités particulières requises - ici principalement la musique mais aussi d’autres formes de spectacles - l’unité, l’organisation globale et la qualité spatiale du lieu. Le projet cherche à concilier l’esprit des « clubs » de jazz et des grands auditoriums de musique. Entre l’espace compact où se joue la proximité avec l’orchestre et le volume suffisant pour que se déploie la qualité acoustique. Entre l’émotion du spectacle vivant et la justesse du son. Ainsi, la salle est composée par un jeu de balcons non symétriques, de pentes progressives, de coursives et de parois acoustiques. Cet aménagement concourt à modeler un espace offrant aux auditeurs des places tout à la fois très différenciées et appartenant fortement à l’ensemble. Les assises sont disposées en gradins courbes, concentriques, dont la pente variable est calculée afin d’offrir une visibilité homogène pour tous les spectateurs. La hauteur totale du gradinage est relativement limitée et permet de conserver un rapport vivant et chaleureux entre publics/musiciens/acteurs. La configuration des entrées médianes et basses permet des accès très aisés pour le public et notamment pour les personnes à mobilité réduite. Ces accès, les allées, les coursives et les balcons constituent autant d’espaces de dégagement, de respiration et de rencontres, notamment la coursive médiane en relation avec le salon et les loges des artistes… L’ensemble des espaces de scènes et d’arrière-scène, le parterre principal sont de plain-pied, permettant ainsi une grande fluidité des circulations (techniques, artistiques ou publics), adaptée à la mise en place et aux représentations des orchestres. La forme acoustique de la scène est donnée par un ensemble de panneaux latéraux mobiles, ils peuvent s’ouvrir pour constituer des surfaces de réflexions ou d’absorptions particulières ainsi que des accès aux coulisses. Ces panneaux se replient, sur un système de rails, pour venir se ranger sous les passerelles pour permettre de constituer des plans de pendrillonages classiques avec un jeu de tentures. Cette forme légèrement en éventail se prolonge directement sur le cadre de scène (et efface celui-ci), les panneaux mobiles latéraux permettent aussi de réduire l’ouverture de scène et de recréer ainsi un cadre (notamment pour les besoins spécifiques d’un spectacle). L’ensemble des parois latérales concourt à la qualité acoustique de la salle, au niveau du proscénium elles abritent également des éléments permettant l’accrochage de matériels d’éclairage et de sonorisation. Au plafond, un faux-gril permet la reprise des efforts des différents éléments scéniques. Un système de rails et de chariots roulants, de suspentes et de tubes permet de positionner les éclairages et les accrochages ponctuels des porteuses motorisées. Au cadre et au-dessus de l’avant-scène, se positionnent d’autres porteuses motorisées pour les implantations lumière. La scène est bordée sur les trois cotés par des passerelles. La passerelle à cour se prolonge pour donner accès à deux passerelles en salle et permet de relier la régie. Ces passerelles permettent également les accès (échelle à crinoline) aux tours scéniques latérales de l’avant-scène. Outils du travail lumière, ces passerelles sont équipées de lisses déportées et de lisses hautes permettant l’implantation des projecteurs d’éclairage. En fond de salle, le grand plateau de la régie ouverte permet aussi l’implantation des poursuites. La disposition des gradins, des allées et des balcons procurent, sans gêne pour la visibilité des spectateurs, des emplacements de régie mobile notamment sur le haut et au pied du gradin médian. Les locaux servants : Le projet privilégie avant tout la compacité des espaces. Il permet ainsi de réduire au maximum le rapport SHON/surfaces utiles. Nous avons réduit au maximum les circulations et évité le croisement des flux public/privé. Dans la zone « backstage », nous avons favorisé une desserte de plain-pied de la salle, alors que les loges s’implantent à l’étage et privilégient l’intimité du musicien ou du comédien. Un salon à l’étage, avec vue sur la placette, offre au spectateur la possibilité de croiser les artistes dans un endroit d’échange. Le bâtiment en encorbellement sur le parvis d’entrée de l’établissement offre un préau à l’abri des intempéries. Le hall distribue une entrée basse et une entrée haute à la salle. Un meuble bar/accueil permet différents usages. Note sur les principes acoustiques Isolation acoustique et respect de l’environnement sonore du bâtiment La salle de concert de Marciac s’installe sur un site calme, dont l’environnement sonore a été conservé. La bonne intégration du bâtiment dans son environnement passe donc tout d’abord par une excellente isolation acoustique de la salle de concert, y compris en basses fréquences. Cette bonne isolation vis-à-vis de l’extérieur assure également une bonne qualité de silence pour l’écoute dans la salle de concert. A cet effet, l’ensemble des parois de la salle de concert est massive avec des parois béton de 25 cm d’épaisseur et sans vitrages. Les parois de béton sont doublées intérieurement par un doublage combinant complément d’isolation acoustique et traitement adapté de l’acoustique interne de la salle de concert. L’ensemble des accès et issues de secours est traité par des sas acoustiques. Une forme architecturale visant l’excellence acoustique pour les concerts La forme architecturale développée pour la salle a pour objectif premier une qualité acoustique optimale pour une utilisation de type salle de concert. En conséquence, le volume de la salle a été fixé à la valeur de 9,5 m³ par spectateur et l’on a opté, côté salle, pour des murs latéraux parallèles : la salle suit donc le modèle éprouvée d’une « shoebox », forme réputée pour fournir les meilleures conditions acoustiques pour une salle de concert, avec une largeur maximale de l’ordre de 19,5m. Un avantage crucial de ces murs latéraux parallèles et d’une largeur de salle relativement réduite est l’apport de réflexions latérales précoces particulièrement favorables à la clarté sonore et à la perception auditive de l’espace. La forme proposée de la cage de scène, trapézoïdale en plan, est également optimale acoustiquement, favorable à la projection sonore depuis la scène vers le public. A fin d’éviter le risque bien connu d’échos flottants et d’effets de modes propres inhérents aux murs latéraux parallèles tout en bénéficiant de tous leurs avantages, un degré important de diffusion acoustique en hautes et en basses fréquences a été incorporé dans le dessin architectural et acoustique. Cette diffusion est apportée par la forme travaillée des murs latéraux, présentant :  des zones d’auditoire et passerelles à différents niveaux, parfois en surplomb (balcon latéral à cour, passerelle technique à jardin), parfois en terrasse sans surplomb (bergerie latérale à jardin),  des fronts de balcons et balustrades aux formes étudiées, en plan comme en coupe, afin d’optimiser la quantité d’énergie latérale précoce tout en cassant le parallélisme des murs extérieurs,  des reliefs de dimensions relativement faibles qui structurent certaines surfaces. Cet apport de diffusion acoustique permet en outre la création d’une bonne homogénéité du champ sonore. L’incorporation de balcons au dessin de la salle a été un élément d’une importance acoustique primordiale. Outre le fait qu’ils permettent plus de proximité, un meilleur rapport entre spectateurs et artistes et une meilleure « intimité » de la salle, ces balcons et zones d’auditoire à différents niveaux apportent des réflexions latérales précoces, conciliant ainsi les aspects perceptifs de clarté, d’enveloppement et de richesse sonore, signature de l’excellence acoustique d’une salle de concert. Une salle à l’acoustique flexible et adaptée à des utilisations variées Partant de cette forme de salle parfaitement appropriée à des événements de type concerts, plusieurs éléments ont été incorporés afin de permettre une adaptation simple et peu onéreuse de l’acoustique de la salle aux différents types de spectacles qui y seront organisés. L’optimum en termes de durée de réverbération et de volume acoustique par spectateur varie suivant le type de spectacle : en comparaison d’un concert non amplifié, une pièce de théâtre nécessite une acoustique plus matte (durée de réverbération plus courte) mais plus puissante (pour que la voix porte suffisamment). Le volume acoustiquement actif de la salle doit donc être adaptable, ou l’environnement acoustique de la scène réglable, afin de créer des conditions acoustiques optimales à la fois pour le théâtre, la musique amplifiée et la musique non amplifiée. La solution adoptée consiste tout d’abord en un système de pendrillons acoustiques adaptables, réalisés à l’aide de panneaux rotatifs présentant une face recouverte d’un rideau et une face acoustiquement réfléchissante en bois laqué. Un pendrillonage « classique » est obtenu lorsque l’ensemble des panneaux est en position ouverte, les rideaux absorbants faisant face au public. Lorsque l’ensemble des panneaux est en position fermée, faces réfléchissantes visibles depuis la scène et la salle, le volume de la scène devient acoustiquement actif. Cette solution permet une adaptation très efficace de l’acoustique de la salle, nécessitant une manutention extrêmement réduite puisque les techniciens ou les artistes peuvent tourner ces panneaux presque aussi simplement que des portes. De cette manière, le volume acoustique de la salle est effectivement rendu adaptable, entre environ 7m³ par spectateur (valeur optimale entre autres pour le théâtre) et environ 9,5 m³ par spectateur (valeur optimale pour la musique non amplifiée). Ce pendrillonnage acoustique variable est associé à une quantité relativement réduite d’absorption acoustique variable côté salle sous forme de rideaux acoustiques s’intégrant harmonieusement à l’architecture de la salle. L’ensemble des éléments d’acoustique variable permettra une variation de la durée de réverbération entre 1,7 et 1,1 secondes, ce qui assure une acoustique adaptée aussi bien au jazz qu’à la musique classique, les concerts pop-rock, la danse, le théâtre ou les spectacles de variétés. Quelque soit le type d’événement ayant lieu dans la salle, l’excellence acoustique passe également par l’obtention d’une bonne qualité de silence : elle est une condition nécessaire à une bonne intelligibilité de la parole, à une bonne clarté et une bonne dynamique pour la musique, et à de bonnes conditions d’enregistrement. Tous les équipements intérieurs à la salle ont donc été choisis pour leurs caractéristiques silencieuses, en particulier les équipements de ventilation. L’isolation acoustique de la salle vis-à-vis des locaux annexes ainsi que de l’extérieur est également soignée.
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